Ma nuit avec Norman Reedus « Verity Journal

Ma nuit avec Norman Reedus

Est-ce que t’es juste en train d’improviser au fur et à mesure, alors que tu enfournes allègrement ce sandwich dans ta bouche, en fait ? Je n’ai jamais eu affaire à une interview faite la bouche pleine. C’est une première.

 

Ecrit par Carly Blackman

Traduit de l’anglais par Emily Fenaughty

Photos par Léonard Bourgois-Beaulieu

 

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Norman Reedus

 

Ce n’est pas le tournant que j’avais imaginé pour l’interview, alors que je me préparais quelques heures plus tôt à aller retrouver Norman Reedus au vernissage de sa toute première exposition parisienne. Pour être tout à fait honnête, je n’avais pas eu vent des travaux de ce garçon 24 heures avant notre première entrevue. Norman Reedus, avais-je découvert, s’était d’ores et déjà insinué dans mes souvenirs d’enfance, au travers notamment de quelques secondes à la portée subliminale dans le clip de Radiohead Fake Plastic Trees. J’appris également qu’il est aujourd’hui connu et reconnu pour être la vedette (et le sex-symbol) de la série The Walking Dead.

 

Il est assez inhabituel pour un photographe d’être poursuivi par une horde de fans lorsqu’il inaugure sa toute première exposition parisienne, mais ce fut le cas pour Norman.

 

 

The sun’s come up like a big bald head — “Le soleil s’est levé tel un grand crâne chauve“. C’est le titre de l’exposition (et du livre sorti à l’occasion), montrée pour la première fois à New York en 2013. Après un passage par Berlin, la voici donc à Paris pour un mois environ, au sein de la galerie « Hors Champ ».

 

Nous sommes en décembre 2016, et les soirées de vernissages ne dérogent pas à leurs règles, avec leurs open-bars et la quantité fantastique de beaux gosses qu’elles attirent toujours.

 

Le vernissage de Norman n’a pas fait exception. Les mecs plutôt mignons étaient bien là, avec leurs vestes en peau de mouton et leurs clopes maladroitement roulées. Sauf que, cette fois-ci, tout laissait à croire que la ville entière s’était passée le mot. Les collectionneurs d’art habituellement policés se transformaient soudain en ados pré-pubères surexcités, tandis que l’événement ultra-privé qui nous avait été promis se condensait en une multitude de petits écrans concentrés autour de la star, assaillie par une foule suante. Pendant ce temps-là, un serveur flanqué d’une tête de singe en caoutchouc servait des verres de whisky en continu. Norman, quant à lui, se tenait au milieu de toute cette agitation, imperturbable, et entouré de deux femmes arrogantes et plus âgées qui ne le lâchaient pas d’une semelle. Il s’agissait de son agent new-yorkais et de la responsable française de ses relations publiques, mais on aurait davantage dit deux gardes du corps dont les cheveux et les chapeaux évoquaient des lances prêtes à empaler quiconque s’approcherait d’un peu trop près.

 

Nos regards se sont alors croisés au dessus de la mêlée, le laissant entrevoir mon état de panique. Il me fit alors un sourire, et je lui rendis. J’imagine qu’il a compris que je n’avais aucune intention de lui réclamer un selfie. Ou de lui sauter dessus. Pas encore, en tout cas. Vue la foule compacte, nous décidions un peu plus tard de nous voir le soir suivant pour réaliser l’interview dans des conditions plus propices.

 

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Norman Reedus

 

Norman: Je pensais vraiment qu’on ne serait qu’une dizaine, en petit comité.

 

Verity:  Oui, moi aussi.

 

N : Mais il y avait genre mille personnes !

 

V : Une véritable ruée.

 

N : Je ne l’avais pas vu venir.

 

V : Mais c’est quand même plutôt positif pour ton travail d’avoir une telle visibilité, non ? D’autant plus que les gens qui sont venus étaient tous très différents.

  

N: Depuis que j’ai commencé à jouer dans la série, c’est comme ça partout où je vais. Si je croise le regard de qui que ce soit, la personne va venir me demander un truc. C’est plutôt bon signe pour l’avenir de la série et pour mon personnage, cela dit. C’est toujours pareil : avec l’avènement des réseaux sociaux et tous ces portables, tout le monde te demande s’il peut te prendre en photo.

 

V : Est-ce que tu penses qu’Instagram est en train d’enterrer la photographie à proprement parler ?

 

N: Non, j’y ai réfléchi, et j’en ai d’ailleurs déjà parlé auparavant. Je pense que ça l’aide plutôt. Quand tu reçois une photo signée de son photographe, elle vaut encore plus désormais. Parce que les photographes peuvent tout prendre en photo par ailleurs. C’est une oeuvre d’art qui a beaucoup de valeur si tu arrives à l’obtenir depuis sa source.

 

 

Alors que j’étais en train de partir du vernissage, j’avais saisi un catalogue afin d’avoir un aperçu de son travail, malheureusement inaccessible à ma vue, perdu dans le flot d’écharpes qui peuplaient la galerie, embaumées par les flots d’alcool. Les photos étaient d’une qualité étonnante. Il y avait là des images de soldats près de barrières de barbelés — qu’il était sûrement trop jeune pour avoir prises, des femmes nues couvertes de sang qu’il n’avait pas pu oser photographier, et des photos d’actrices dans leur loge qui évoquaient pour moi un backstage du Blue Velvet de Lynch.

 

Il est très difficile de déterminer l’âge de Norman quand il vous parle : il pourrait tout à fait être cet adolescent avec qui vous entreteniez une relation ambigüe, mais une peau un peu froissée le trahit et révèle sa nature d’homme d’âge moyen.

 

 

V: Qu’en est-il des images qui semblent avoir été prises dans des camps de prisonniers?

 

N: Elles n’ont pas été prises dans des camps. Elles viennent de Moscou. J’étais là-bas pour un film avec Andreï Konchalovsky et nous avons tourné dans des lieux perdus au milieu de la nuit. On s’est retrouvés par hasard à un endroit où traînaient beaucoup de jeunes garçons qui allaient rejoindre l’armée. Ils ont commencé à me parler (ils m’ont reconnu d’un film), alors on a échangé quelques objets à travers la clôture avant qu’ils partent pour rejoindre leurs rangs. Des boucles de ceinture, des cigarettes, des briquets, on leur a filé à peu prés tout ce que nous avions et on est devenus amis comme ça, au milieu de la nuit.

(…)

 

 

Vous voulez connaitre la suite ? 

Retrouvez-la sur le site du magazine Verity : www.veritymagazine.com

 

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